Cérémonie de signature de l’accord d’Alger : IBK a eu un discours de vrai chef d’état

Annoncée en grande pompe dans le monde entier, la cérémonie de signature officielle de l’accord d’Alger censée faire renaître l’espoir entre les maliens s’est déroulé au CICB avec une pléthore de chefs d’états invités et de représentants de chefs absents. 

La presse outre l’ORTM n’avait pas droit au chapitre ;  notre correspondant à Bamako Sadio NIAKATE disposant d’une accréditation a été prié de rejoindre d’autres représentants de médias dans une salle équipée d’un écran géant pour suivre l’évènement. Côté retransmission, on ne va pas s’en offusquer car l’ORTM n’a ni les hommes ni l’intention de valoriser sa prestation quel que soit l’évènement.  Le manque de culture de la chose de la part des commentateurs fut flagrant, les blancs succédaient aux approximations. Aucune surprise sur la qualité de cette retransmission, la passion de se servir du public est son slogan. Le maître de cérémonie sortie des cavernes n’avait pas compris que le moindre petit bruit proche d’un micro directionnel faisait grand effet. Il avait la manie de respirer très fort avant chaque prise de parole ce qui était un supplice pour tous ceux qui ont suivi la cérémonie durant les quatre heures. Mention spéciale pour lui qu’on ne devrait pas revoir de sitôt.

On pourrait s’autosatisfaire de la présence de nombreux chefs d’état et de responsables d’institutions mais il y a des absences qui se font plus remarquer que certaines présences. Du début de cette crise jusqu’à aujourd’hui, la France fut la pièce maîtresse au point que son président a fixé la date de la présidentielle malienne de façon unilatérale pour débroussailler le chemin vers la légitimé du président malien – chose nécessaire pour négocier la paix.  Aujourd’hui, le président IBK qui aime affectueusement appeler François HOLLANDE « mon ami François HOLLANDE » aurait été heureux de sa présence à ses côtés. L’ombre de François HOLLANDE a plané sur cette cérémonie que le président IBK a voulue solennelle.   Non seulement le président français n’a pas jugé nécessaire de se déplacer à Bamako, mais il n’a pas délégué Laurent FABIUS ni Manuel VALLS et encore moins son ministre de la défense. Il a posté une simple secrétaire d’état comme pour la formalité. Cette attitude a été remarquée par tous et certainement dénoncée. Ceci indique le niveau de l’attachement de la France pour la paix au Mali.

Le président Macky Sall, voisin du Mali et partageant plus que des frontières avec le Mali n’a pas daigné faire quelques kilomètres à bord de son avion présidentiel. Lui, Macky SALL, le Christophe Magellan des temps modernes qui s’est rendu en larmes à Paris le 11 Janvier 2015. Lui, l’oiseau voyageur qui s’est rendu en Guadeloupe sur invitation de la France pour l’inauguration du mémorial acte n’a pas trouvé nécessaire de venir soutenir son voisin presque de la même famille. Il s’est fait représenter par un parlementaire car certainement son premier ministre, son ministre des affaires étrangères étaient occupés à mieux faire.

Du côté des chefs d’état présents, Robert MUGABE du haut de son âge et de la distance a joué le jeu. Il est sorti des discours creux pour meubler son temps de parole. Il a fait du MUGABE dans le texte. A part MUGABE, toutes les personnalités ayant pris la parole ont distillé des discours de circonstance pour contenter toute le monde puisqu’il s’agit de faire la paix.

On s’interrogeait sur l’attitude du président IBK pour sa prise de parole. Certains avaient parié sur des larmes puisque le moment était unique dans une vie de président. Mais ce fut autre, un nouveau IBK qui a regardé droit dans les yeux le représentant du secrétaire général des nations unies et le responsable de la MINUSMA  pour leur rappeler que le peuple malien et le Mali méritent plus d’égard et de respect. Il a rappelé la situation intenable des soldats maliens cantonnés qui ne bénéficient d’aucune amélioration. Il a dit que jamais le peuple malien n’avait manqué à ses engagements ni commis une entorse dans les relations internationales. « Nous sommes un pays tolérant mais pas lâche, le Mali ne demande que son dû, ni plus ni moins ». « Tous les enfants maliens vont à l’école sauf ceux de Kidal, j’en ai mal au cœur ». « Nous ne sommes pas des gueux ». Ces phrases qui deviendront certainement célèbres sont les invectives d’IBK envers ses invités qui détiennent les clés du problème. Il continua en disant qu’il a dû informer la CEDEAO de la situation intenable des soldats maliens cantonnés alors que l’accord de Ouagadougou était sensé désarmer les combattants et rétablir l’ordre. Selon lui, certaines parties se sont permis des arrangements avec la loi. IBK a loué les qualités de son premier ministre Modibo KEITA qui aurait fait preuve de patience et de clairvoyance pour aboutir à cet accord. « Mon aîné » est le nom affectif par lequel il nomme son premier ministre qui lui aurait évité des excès. Les chefs religieux et la société civile ne sont pas en reste :  IBK leur reconnait un rôle dans l’apaisement des uns et des autres. Sur le plan diplomatique, le discours du président fut musclé à hauteur de souhait. Il a lancé des piques et des rappels des missions de ceux qui sont mandatés pour la résolution de la crise malienne. On a aperçu un homme d’état pour une fois qui a pris ses responsabilités devant le parterre de chefs d’état et d’institutions.  On aime voir un IBK de poigne qui rappelle celui des années où il était encore à la primature.

La fausse note du discours fut le fait qu’il n’ait pas fait allusion aux jeunes soldats maliens morts et qui continuent de mourir tous les jours sur le champ de l’honneur. Il aurait fallu profiter de cette occasion pour les célébrer solennellement en citant des noms et quelques anecdotes pour revigorer ceux qui sont mobilisés sur le terrain afin que ces derniers se reconnaissent dans l’hommage.  Ces femmes violées, ces hommes et femmes dont les mains ont été tranchées sous le règne d’Ansar dine auraient pu trouver une reconnaissance aux yeux du président de la république. La diaspora malienne qui soutient l’économie à travers les transferts de fond aurait pu être saluée pour glorifier son rôle dans l’effort de paix.

Globalement si l’on peut douter de la bonne foi de tous les signataires de l’accord d’Alger, si l’on peut se poser la question des moyens qui seront mis à la disposition du Mali pour appliquer cet accord, on peut dire que cette cérémonie fut un bon moyen de communication qui donnera du temps politique et de la visibilité au Mali sur le plan international. Cela pour afficher sa bonne foi d’aboutir à la paix réelle sur toute l’étendue du territoire.

Elijah de Bla

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