Lettre ouverte de Kankou au Président IBK

Lettre au Président de la République du Mali.

Ibrahim Boubacar KEITA,

C’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures confitures. Ce proverbe ne s’applique PAS à la politique et encore moins au Mali.

Il parait que c’est tendance de commencer ses textes par des citations dénuées de sens mais je n’ai pas pu résister à l’envie de donner du sens à la mienne.

Si vous le permettez, je vous appellerais par votre prénom. D’abord parce que vous me faîtes penser à mon tonton ce qui vous fait descendre d’un premier piédestal mais aussi parce que je ne pense pas, pardonnez-moi pour ce qui va suivre mais il faut que je le dise, que vous méritiez le titre de « Son Excellence » (pour information, j’ai même failli utiliser le tutoiement en plus de ça mais on m’a fait comprendre que j’allais trop loin. Raisonnable que je suis, je vais suivre les conseils de mes ainés).

D’abord Ibrahim, je dois vous avouer que votre élection à la Présidence du Mali m’a surprise. Comme je l’expliquais à mon papa, la seule façon pour le Mali de sortir de l’impasse c’est, selon moi, de rompre avec l’ancienne classe politique. De laisser place à la jeunesse qui ne serait pas corrompue et ne voudrait que le bien du pays. De cesser avec ce cercle de l’assistanat pour grandir, comme le font nombre de nos voisins africains.

Pourtant, les maliens ont majoritairement voté pour vous. Je dis majoritairement car je reconnais que je n’ai pas voté. Ni pour vous, ni pour personne d’autre. D’ailleurs c’est simple, je n’avais pas de carte NINA®, cette fameuse carte dont beaucoup parlaient mais que peu ont vue.

Passons.

Les maliens ont donc majoritairement décidé de vous placer à la fonction suprême en croyant en votre discours et votre slogan «  le Mali d’abord ». A votre apparence d’homme proche du Peuple.

A Bamako au moment de la campagne, je dois concéder que j’y ai cru. Un dixième de seconde. Puis je me suis souvenue qu’on ne fait pas du neuf avec de l’ancien sinon ça se saurait.

Jour après jour, évènement avec évènement, j’ai été déçue par vos décisions en tant que chef. Vos actions en tant que chef. J’ai fini par vous cataloguer de saule pleureur et éteindre ma télévision à chacune de vos apparitions sur l’ORTM. Un président à la larme si facile quand il s’agit des autres, vous comprendrez que le surnom était tout trouvé. J’aurais seulement préféré que vous pleuriez pour des maliens qui n’avaient rien demandé à personne morts dans leur propre pays à cause de la folie de certains.

Vous avez aussi cédé une partie du pays pour obtenir un semblant de paix au lieu de vous battre pour son intégrité. Vous avez fait du pays un enfant de la France au lieu d’en faire son égal. J’appelle cela de la Haute Trahison, d’autres appelleront ça de la grandeur d’esprit. Chacun voit midi à sa porte.

Il y a eu l’affaire des surfacturations et de l’avion présidentiel également. Vous en souvenez-vous ? Oui, comment l’oublier ? Ca a aussi fait couler beaucoup d’encre et je ne remuerai pas le couteau dans la plaie.

Je pourrais encore dérouler plusieurs autres évènements, mais le but de ce papier n’est pas de faire le point sur le début de votre mandat que l’on peut d’ores et déjà qualifier de chaotique. De toute façon, je dois vous avouer que tout au long, j’ai un peu perdu espoir pour le pays de mes ancêtres. Moi qui rêvais de son développement économique et politique… Quelle déception. Le coup d’État a porté un premier coup à cet espoir, votre mandat l’a achevé et mis en terre.

Je ne pensais pas pouvoir arriver plus bas et pourtant… Avec votre dernier communiqué, vous avez creusé à coup de pelleteuse.

Un règlement de comptes. Via un communiqué officiel du gouvernement.

En le lisant, ma réaction première a été de me poser la question suivante : un Président de la République n’est-il pas supposé être «  au-dessus » du lot ?

Apparemment non, vous vous êtes roulé allégrement dans la boue salissant au passage la fonction que vous occupez.

Le ton est donné, les faits sont têtus, la rhétorique est digne d’une dictature ; on a osé s’attaquer au chef suprême alors, « Le gouvernement prend le peuple à témoin et se réserve le droit de tirer toutes les conséquences des agissements qui corrodent la démocratie ».

S’agissait-il réellement de protéger la démocratie ?

En tout cas, les menaces sont à peine voilées. De la part de quelqu’un qui marchait à Paris il y a neuf mois parce qu’il était Charlie, j’ai du mal à comprendre. La liberté d’expression serait sélective et on ne devrait rien dire qui vous fâcherait. Ne serait-elle valable qu’en Occident ?

Heureusement que le ridicule ne tue pas [expression #2] sinon nous devrions organiser de nouvelles élections présidentielles.

Pour la suite et la fin de votre mandat, si je peux me permettre de vous donner un conseil à mon tout petit niveau, récupérez votre dignité, cessez de prendre les maliens pour des gens stupides, bien que certains le soient, et tenez vos promesses. Mettez fin à la corruption qui gangrène le pays, soignez la santé qui est sur son lit de mort, redressez l’éducation, donnez à la jeunesse malienne une chance de voir son pays se relever. Il y aurait tellement d’autres choses à faire…

Agissez pour le Mali et non pas uniquement pour vous. Vous en avez le pouvoir contrairement à vos détracteurs au sein de l’opposition qui, je le rappelle, fait partie du jeu démocratique et est même la critique indispensable.

A défaut, je crains que les critiques ne se fassent de plus en plus virulentes à votre égard et des communiqués, vous allez malheureusement devoir en faire rédiger de plus en plus.

 

Kankou

 

 

 

 

 

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