Itinéraire d’un franco-malien en Corée du sud

En France nous avons souvent tendance à sous-estimer les opportunités que les universités peuvent nous fournir, en particulier celle de l’Université Paris 13. Elle permet à ses étudiants d’effectuer des semestres à l’étranger. J’avais déjà effectué un séjour Erasmus en Espagne lors de mon année de licence. A ce moment là on tombe dans un “virus” de l’aventure. On veut à nouveau voyager dans d’autre pays, d’autres continents voir de nouvelles choses. Je cherchais à partir dans un continent dans lequel je n’avait jamais été : l’Asie ou l’Amérique. Lors de ma dernière année de Master, mon université avait signé des accords bilatéraux avec des universités d’Asie. Ce partenariat me permettait d’effectuer à nouveau un semestre à l’étranger. Mon choix se porta sur l’université d’Ajou dans la banlieue de Séoul.

Avant de partir dans ce pays dont je ne connaissais quasiment rien (je connaissais un peu mieux le Japon grâce aux mangas), mon master me donna des renseignements sur la santé économique du pays. Malheureusement au niveau de la culture ou de la langue, aucune information ne fut communiquée par l’école.

Certains m’avaient dressé deux portraits de la Corée avant mon départ : celui d’un pays nationaliste conservateur qui discriminerait les étrangers, des coréens qui auraient des préjugés négatifs envers les africains comme on peut le voir dans certains cas en Chine. Le second était au contraire beaucoup plus optimiste, celui d’une société collectiviste et hospitalière qu’on a l’habitude de voir en Afrique. Lors de mon départ je décidais donc de n’avoir aucun préjugé négatif ou positif, j’allais vérifier cela par moi même.

Avant mon arrivée, un correspondant de mon université m’avait donné des indications pour arriver à destination sans problèmes et sans avoir à débourser trop d’argent. Les choses se passèrent très vite à l’aéroport, je passa rapidement le check point, récupéra rapidement mes bagages et pris le bus qui m’amenait vers ma destination. Lorsque que j’arriva à Suwon, la ville où j’allais étudier je pris un taxi pour pouvoir arriver à l’université.

A ce moment là commença mon premier choc culturel lié à la langue : je devais expliquer au chauffeur de taxi qui ne comprenais pas bien l’anglais où est ce qu’il doit m’emmener. Finalement j’arrivais à l’université, et le chauffeur m’aida à sortir mes bagages.
A mon arrivée un étudiant coréen m’aida à porter mes bagages et me guida jusqu’à mon dortoir. J’étais un peu surpris car il est venu spontanément me proposer son aide. C’est ainsi que démarra mon séjour en Corée.
La première chose qui me marqua en Corée fut l’hospitalité des coréens. La plupart sont très accueillants, ils n’hésitent pas à aider. De plus les organisations étudiantes créent des évènements pour aider les uns et les autres à tisser des liens. Je ne me suis jamais senti rejeté en tant qu’étranger. Dès ma première semaine j’avais reçu des invitations à des barbecues qui avaient lieu dans un restaurant ou dans certains cas chez les étudiants.

J’ai sentis un accueil vraiment chaleureux, une volonté de vouloir échanger avec moi à propos de ma double culture.

Mon second choc culturel fut la cuisine qui est beaucoup plus épicée que celle que j’ai connu en France. Je n’ai pas hérité de cette passion pour les plats pimentés que l’on a en Afrique de l’ouest ! Les autres difficultés furent de trouver des plats sans porcs et un légume que l’on appelle le “Kimchi” . C’est leur légume “national”, il est servi à tous les repas, on ne peut pas y échapper. Maintenant que je ne suis plus la bas je peux dire la vérité : amis coréen je n’aime pas votre Kimchi !
J’ai trouvé aussi quelques similitudes avec la culture africaine. C’est peut être même ce qui m’a le plus surpris. Tout comme en Afrique, les coréens lorsqu’ils mangent partagent le même plat. La seule différence, c’est qu’ils ne mangent pas à la main au sol, mais sur une table avec des cuillères. Le repas est vraiment un point clé pour se sociabiliser en Corée. A travers un repas on fait de nouvelles connaissances, on apprend à connaître ses camarades ou collègues si on travaille.

Il y’a d’autre similitudes que les coréens ont avec les ouest africains. C’est une société qui est collectivise, et privilégie dans ses relations l’harmonie. Les travaux universitaires sont souvent en groupe, même dans les sports individuels, il y’a une esprit de groupe. Lorsque l’on a un souci on essaye de le régler de manière diplomate.
Il y’a aussi une pudeur au niveau des couples. La famille a aussi une place importante. Par rapport à la société française, la Corée est une société plus conservatrice au niveau des mœurs. Elle hérite aussi des inconvénients du collectivisme comme le poids du « qu’en dira t-on ». Les gens ne vivent pas pour eux mais en fonction du regard que la société va les porter.

C’est un pays où tout va très vite et les personnes passent énormément de temps sur leur lieu de travail. Le pire c’est que ça ne débouche pas forcément sur une meilleure productivité.

Ce qui m’a aussi marqué en Corée c’est le niveau de discipline, ainsi que l’éthique de ses habitants. Si vous perdez un objet, il y’a de grande chance qu’on vous le restitue. La délinquance est à un niveau très bas par rapport à ce que l’on peut voir en France.

L’une des choses qui m’a fasciné est la manière dont ils ont réussis à protéger leur marché local malgré la mondialisation. Les téléphones et télévisions sont Samsung ou Lg. Les voitures coréennes sont Kia, Hyundai ou encore Renaud Samsung. En gros ils consomment coréen avant de consommer étranger.

La plus grande barrière pour moi fut celle de la langue qui a en plus une écriture différente de la notre. Pour ceux qui souhaitent s’installer plus longtemps, la maitrise de l’anglais n’est pas suffisante il est nécessaire d’avoir de bonnes bases en coréens. On peut communiquer en anglais avec des étudiants, mais avec une grande partie de la population cela n’est pas possible. Beaucoup de coréens sont anglophobes. Parmi les nombreux inconvénients de ne pas comprendre une langue, on ne peut pas comprendre les remarques négatives que l’on peut dire sur nous.

L’autre point noir, est le coût de la vie et le peu d’aide que tu as. En France on a la chance de bénéficier de nombreuses aides et l’éducation est assez accessible même pour quelqu’un issu d’un milieu populaire; ce qui n’est pas le cas en Corée. L’accès à l’université est chère. Il faut soit avoir des parents aisés finançant les études des enfants ou il faut travailler pour pouvoir les financer soi-même. Je n’ai vu que très peu de pauvres, donc c’est difficile de vraiment parler de cela.
Certaines personnes âgées sont livrées à elles-même et essayent de survivre en ramassant du matériel recyclable ou autre dans les poubelles.

En parlant de la France, j’ai pu constater une certaine fascination pour ce pays en Corée. En tant qu’étudiant français, j’ai pu participer à des activités d’échanges franco-coréens intéressants. A travers différents évènements comme les tournois de pétanques, les barbecues coréens et autres, je fus bien accueilli par la communauté française (étudiants).

Malgré la barrière de la langue, la convivialité et la politesse des coréens aident grandement. Ils font l’effort pour aider ou guider pour se rendre à un endroit ou accéder à un service. Certains viennent spontanément proposer leur aide.

C’est un pays qui me semble très tolérant, notamment en matière de religion. Dans le dortoir de mon université a été aménagé une salle de prière. Ce qui m’a vraiment surpris. On peut en effet être un pays laïc et ne pas s’acharner sur les religions minoritaires au nom de ce principe.

J’ai aussi eu la surprise de découvrir que l’Afrique intéressait les coréens, certes de façon minoritaire mais observable. Certains apprennent même le français (la domination française sur ce continent n’a pas d’équivalent) pour se rapprocher des pays d’Afrique francophone.
J’ai même découvert qu’il y’avait une association pro-africaine dans mon université. Ce qui veut dire que malgré la propagande médiatique défavorable, l’Afrique reste attractive.

Sans doute cela est dû aux immenses ressources que possède ce continent.

Au cours de mon séjour j’ai participé à certains de leur festival, visité leurs temples. Je pense que leur ouverture d’esprit et tolérance viennent du Bouddhisme (même si maintenant la majorité des coréens sont athées). J’ai pu noter des similitudes et différences entre les sociétés coréennes et ouest africaines :

La Corée a été colonisé par une puissante nation : le Japon, tandis que les pays de l’Afrique de l’ouest par la France et l’Angleterre. Les frontières de la Corée du Sud et du Nord n’ont pas été établies par les Coréen mais par les deux puissances de l’époque : les Etats-Unis et l’ex URSS. Dans le cas du Mali et de l’Afrique en général, les nations européennes se sont partagés l’Afrique comme on pourrait partager un gâteau sans tenir compte des peuples qui vivent dans ces territoires.

La Corée tout comme beaucoup de pays d’Afrique a connu une période de dictature. Les Coréens sont aussi dominés militairement et sous-traitent leur sécurité aux américains. En Afrique de l’Ouest ce sont les français qui jouent le rôle de gendarme.

Cependant, la Corée du Sud n’a quasiment pas de ressources alors que les pays africains en regorgent. De plus en 1960, la Corée était derrière la Cote d’Ivoire au niveau du développement, maintenant la Corée est un pays du Nord alors que la Cote d’Ivoire et certains autres de l’Afrique de l’Ouest restent des pays en voie de développement. Pourquoi cet écart ? Comment un pays qui avait autant d’obstacles voire plus lors de son indépendance a pu évoluer et être maintenant loin devant l’Afrique ? Pourquoi la Corée qui peut subir les mêmes contraintes d’ingérences arrive à se développer et pas le Mali ou un autre pays de l’Afrique de l’Ouest ? J’attends vos avis pour essayer dans un prochain article de répondre à ces
questions.

Mansa Moussa

Malian flag

The World Heritage

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