De Tunis 94 à la CAN2015 les aigles du Mali volent plus haut que la haine et le racisme

Il y a vingt ans de cela en Tunisie lors de la CAN94, les aigles du Mali piqués au vif par les propos condescendants teintés de racisme de la part du sélectionneur tunisien de l’époque avaient fait taire les critiques dès le match d’ouverture. En effet le Mali avait battu d’entrée le pays organisateur par le score sans équivoque de 2 buts à 0. Le peuple malien comme un seul venait d’oublier ses multiples problèmes politiques et sociétaux sous un certain Alpha Omar KONARE avec pour premier ministre IBK.

Revenons au contexte très tendu de cette CAN94 pour le Mali. Le Mali venait de se qualifier à la CAN après plusieurs décennies de disettes footballistiques. Les aigles n’y allaient donc pas en favoris mais en proie selon certains observateurs dont le tristement célèbre sélectionneur tunisien en 1994. Sûr de lui et des capacités supérieures de son équipe, il avait juré de démissionner si les aigles du Mali battaient la Tunisie. Cette phrase aussi inutile que provocatrice était devenue le sujet phare des discussions au Mali plusieurs mois avant le coup d’envoi de l’épreuve. Cette provocation prenait tout son sens dans la mesure où le Mali devait affronter la Tunisie favorite chez elle lors du match inaugural.

Pour rendre l’histoire encore plus belle, le sort avait prévu une crise universitaire avec son lot de grèves d’élèves et étudiants. Les responsables politiques étaient opposés comme si le pays était en guerre. Des dizaines de responsables estudiantins étaient emprisonnés pour motif de trouble à l’ordre publique. La situation était si tendue que la préparation des aigles du Mali pouvaient le ressentir. Rien au Mali en cette période n’invitait à l’optimisme. D’ailleurs le ministre des sports de l’époque maitre Boubacar Karamoko avait été prié par son parti politique de démissionner du gouvernement IBK. Il refusa pour des raisons de primauté de la nation sur les intérêts politiques. Effectivement vu sous cet angle les aigles du Mali  ne pouvaient déclencher des hautes enchères.

Du 26 Mars au 10 avril 1994, les 12 meilleures nations de football du continent se mesurèrent les unes aux autres. Comme prévu la Tunisie affronta le Mali en match d’ouverture devant le reste du monde au Stade olympique d’El Menzah. Chaque malien se souvient de l’endroit où il se trouvait ce jour pour assister à ce match qui est entré dans les annales du football malien et qui a certainement une valeur sentimentale pour chacun.  Dès le coup d’envoi, nombreux furent des malaises, c’est ainsi au Mali, personne ne saura vous expliquer l’origine de ces innombrables pertes de connaissance pendant les matchs des aigles du Mali.

Revenons à l’aspect technique du match lui-même. La bande à Fernand Coulibaly et le gardien de but Ousmane Farota (meilleur gardien du tournoi) en ont surpris plus d’un y compris les maliens. Dès la 25eme minute, la star de l’équipe malienne avec ses dreadlocks Fernand Coulibaly ouvrit le score sous le regard médusé du sélectionneur tunisien et du peuple tunisien. Il fallait le vivre pour comprendre l’état d’esprit qui était celui de chaque malien à cet instant. Si le temps pouvait se figer en ce moment, tous les problèmes maliens auraient trouvé une solution dans cette action de but construite dans les règles de l’art.  Comme si cela ne suffisait pas, les hommes ragaillardis de feu Mamadou Keita alias Capi doublèrent le score sur un coup franc  digne de David Beckham ou de Roberto Carlos. Ce coup magistral était l’œuvre de Modibo Sidibé défenseur de son état. Le Mali finira par contrôler le reste du match à son avantage jusqu’à la 90eme minute. Une victoire sur l’équipe du sélectionneur condescendant venait d’être offerte par les aigles au peuple du Mali en liesse dans toutes les villes et villages du pays. Sur les dernières décennies, les maliens ont rarement été unanimes sur un évènement pareil.

Cette histoire vous est racontée pour tisser un parallèle avec la victoire du jour et la qualification des aigles à la CAN2015, vingt ans après celle de 1994. Ce n’est ni le même lieu, ni les mêmes acteurs mais le peuple attaqué lui n’a pas changé et les attaques dans le but de dénigrer sont identiques. Le bourreau cette fois ci est une partie des supporters et internautes algériens dont l’équipe nationale affrontait le Mali lors du dernier match de poule qualificatif pour la CAN qui se déroulait à Bamako. Les échanges n’ont pas volé très haut. Les mots choisis non plus. On pouvait lire sur les réseaux sociaux des insinuations au virus de la fièvre Ebola qui serait l’avenir des maliens et le SIDA leur passé. Les medias officiels et les internautes se sont donné en spectacle honteux et raciste envers les supporters et l’équipe malienne. Il faut exclure tout amalgame, seule une partie des algériens est coupable de ce comportement dénué de sens.

Tout comme en 1994, les aigles, ailes dans l’eau et becs cloués ont réussi à déployer encore plus ces ailes pour laver l’affront fait au peuple malien. Ce fut si beau que c’est suffisant à faire taire le plus coriace des idiots. Le Mali pour se qualifier pour la CAN2015 vient de battre l’Algérie sur le même score de 2 à 0 comme en 1994. Seydou Keita va donc guider sa bande pour participer à sa 5ieme CAN d’affilée.

La morale de l’histoire pourrait ressembler à une bande de gamins doués qui se mettent en difficulté jusqu’à ce que quelqu’un décide de leur lancer un défi. L’histoire vient une fois de plus de prouver que dès que l’équipe du Mali est dos au mur sans possibilité de faire l’autruche, ils font l’aigle c’est-à-dire volent haut, très haut, le plus haut.

 

Elijah De BLA

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