A la découverte du pionnier du panafricanisme Marcus Mosiah Garvey

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Qui est Marcus Mosiah Garvey ?


Marcus Mosiah Garvey, né le 17 août 1887 à Saint Ann’s Bay, Jamaïque, et mort le 10 juin 1940 à Hammersmith, Londres, est un leader noir du XXe siècle, considéré comme un prophète par les adeptes du mouvement rastafari, d’où son surnom « Moses » (« Moïse » en français) ou « The Black Moses » (« Le Moïse noir »). Burning Spear lui consacra même deux albums entiers. Peter Tosh fait référence à l’homme sur le morceau The Prophets (Album Bush Doctor, Rolling Stones Records, 1978) et Bob Marley l’évoque aussi sur Kinky reggae (album Catch a Fire, lsland, 1973). Globalement incompris et calomnié aux Etats-Unis, il était en revanche adoré et respecté par ses compatriotes jamaïcains. Précurseur du panafricanisme, il se fait le chantre de l’union des noirs du monde entier à travers son journal The Negro World et le promoteur obstiné du retour des descendants des esclaves noirs vers l’Afrique (ce qu’on appelle le « Back to Africa » ou le « Repatriation » notamment dans la culture rasta). Wikipédia

Marcus Mosiah Garvey est l’une des figures les plus emblématiques de la cause noire. En 1917 il fonde l’Association universelle pour l’amélioration de la condition noire (United Negro Improvement Association, UNIA, toujours en activité). La devise de cette association était Un Dieu ! Un But ! Une Destinée! (One God! One aim! One destiny!) destinée à améliorer la condition noire. Face aux conditions de vie déplorables de sa communauté, il comprend que l’indépendance financière sera la clé pour la souveraineté du peuple noir. Il développe alors une économie parallèle et souterraine, à partir de fonds collectés uniquement au sein de sa communauté. Ce qui lui a ensuite permit de répondre aux besoins de son peuples et palier aux ravages du chômage à travers la création d’usines. Mais aussi des réseaux de distribution et des journaux pour assurer la diffusion d’informations stratégiques aux noirs.

Surnommé le « Jésus noire » il créé la « Black Star Line » une compagnie maritime à partir de laquelle il va mener son projet de rapatriement des noirs américains et caribéens en Afrique. Grâce à l’influence acquise au sein de la communauté noire et bien au de là, il réclama un droit au rapatriement.

M.Garvey est l’un des premiers à avoir posé les jalons du panafricanisme. Le Libéria fut l’une des principales terres d’accueil des descendants d’esclaves. Il est fondé en 1821 par une société américaine de colonisation. Malheureusement le Libéria en tant que terre panafricaine comme l’a rêvé Garvey n’a jamais fonctionné. C’est même l’inverse qui s’est produit. Le Libéria n’est qu’une pâle copie du système socio-économique qui existait dans les Amériques et les Caraïbes. C’est-à-dire une hiérarchisation selon la couleur de peau, avec une domination économique et donc politique des populations les plus claires de peau (issues d’union entre maîtres blancs et esclaves noires) représentant la minorité. C’est le 1er pays indépendant du continent. Mais par la nature de sa structure sociale, le pays a traversé de nombreux conflits (travail forcé & ségrégation des populations natives, guerre civile …). Toute société basée sur une ségrégation raciale avec la domination d’une minorité comme on l’observe également jusqu’à aujourd’hui dans les Amériques et les Caraïbes ne fonctionne pas. Les américano-libériens (moins de 5% de la population) portent pour la plupart des patronymes anglophones, ils représentent la classe dirigeante et dominante économiquement. Quant aux populations natives du pays, elles portent des patronymes africains et sont les plus pauvres. Ces deux populations n’ont pas réussi à créer un vivre ensemble propice aux deux communautés.

Le projet de Garvey a certes échoué mais celui-ci est plus que jamais d’actualité. La situation des noirs a évolué depuis les années 20 (abolition de la ségrégation, de l’apartheid, de la colonisation). Il reste toutefois encore un long chemin à parcourir. Mais au quatre coins du monde notre communauté se bat pour transformer le projet de M.Garvey en une réalité immuable. Les futures générations ne doivent pas vivre à nouveau cette situation.

Il y’a encore une dizaine d’années le bilan était plutôt négatif, la communauté noire était l’une des rares  à toujours dépendre presque totalement des autres communautés. Elle se limitait pour sa majorité à être un simple consommateur et offrait le luxe aux autres communautés de produire et vendre ce qu’elle consomme. Mais depuis les choses ont changé et sont encourageantes. Il semblerait que les idéaux de Marcus Garvey reviennent enfin à l’ordre du jour. Il était effectivement temps que nous reprenions le flambeau de cet illustre homme.

C’est avec un génie remarquable qu’en pleine période ségrégationniste un noir est pu réaliser un projet aussi complexe. Malgré un environnement plus propice pour le peuple noir il nous a été très difficile de nous créer un environnement économique favorable. Et pourtant, malgré tous les obstacles et difficultés de l’époque M.Garvey a su offrir au peuple noir une certaine puissance économique et par ricochet politique qui faisait même peur à la communauté internationale. L’heure du réveil à enfin sonnée, le boom économique du continent africain entamé en 2000 (croissance estimée de 5 à 7% prévue jusqu’en 2025) a attiré beaucoup d’investisseurs et multinationales. Mais les entreprises africaines restent celles qui tirent vraiment leur épingle du jeu. Et cela s’explique par la montée en puissance des groupes africains, le nombre d’entreprises africaines réalisant un chiffre d’affaires de plus d’un milliard de dollars se chiffrait entre 200 et 250 en 2010 et aujourd’hui elles se chiffrent à plus de 400 (selon le rapport Lions on the move du cabinet Mckinsey). Cette progression et l’émergence d’entreprises panafricaines sur le continent s’explique aussi par des soutiens gouvernementaux. Les leaders du contient ont vu leurs activités se développer grâce à des politiques protectionnistes de leurs états. Le groupe Dangoté spécialisé dans le ciment et l’agroalimentaire a largement bénéficié du protectionisme mis en place par le gouvernement nigérian sur le ciment. L’essor de compagnies privées dans le secteur pétrolier a été aussi permis grâce au soutien du gouvernement, on observe également cela dans d’autres pays anglophones comme l’Ethiopie. Cette progression économique a été possible grâce au soutien des états. Ce qui renvoi aux principes de bases utilisés par M.Garvey ainsi qu’à toute économie étatique prospère. Pourtant, beaucoup de multinationales ont tenté de se faire une place au soleil mais le bilan semble plutôt négatif pour la plupart d’entre elles. Prenons l’exemple du géant de l’agroalimentaire Nestlé. Depuis 2010 l’entreprise a investie un milliard de dollars sur le continent, mais les résultats escomptés n’ont pas été au rendez-vous d’après une annonce du groupe en juin 2015.

La bataille se joue aussi au niveau des petits opérateurs économiques, prenons l’exemple de l’industrie capillaire afro aux Etats Unis. Depuis les années 70, ce marché de plusieurs milliards de dollars est dominé par les familles asiatiques surtout Coréennes. Elles ont créée toute une industrie où elle règne et dont il était quasi impossible pour les membres de la communauté noire de pénétrer. Mais grâce aux nombreuses initiatives de membres de la communauté noire, les choses changent. Les afros américains sont aujourd’hui propriétaires de certains magasins mais aussi fabricants grâce au retour au naturel des femmes noires. Des marques comme Carol’s daughters (rachetée l’année dernière par l’Oréal, avec un CA pour 2015 de 27 millions de dollars) ou Alikay natural’s. On observe le même phénomène en France mais aussi en Afrique. Le retour au naturel des femmes noires a été l’occasion de se réapproprier une industrie qui nous appartient. Il est important de rappeler que cette évolution a été uniquement possible grâce a une prise de conscience de la population noire tant sur le plan identitaire, économique et communautaire.

Toute communauté doit être fière de ce qu’elle est et créer une économie autour de son identité et ses besoins.

Le boom économique de l’Afrique incite aussi dorénavant les étudiants partis à l’étranger pour étudier à revenir pour tenter leur chance au pays ou sur le continent. C’est d’ailleurs l’élite parmi ces étudiants que l’on retrouve à la direction des sociétés panafricaines les plus prospères. Les grands groupes comme Eco Bank, United Bank for Africa ou Oando sont aujourd’hui plébiscités par ces jeunes diplômés.

Il y’a aussi le phénomène des « returnees » qu’on observe beaucoup dans les pays anglophones. Il s’agit de ces personnes de la diaspora qui décident de revenir sur le continent. Les Nigérians et Ghanéens illustrent très bien ce phénomène. Entre 2008 et 2013 la position du Nigéria concernant le maintien des personnes formées et qualifiées sur son territoire est passée du rang 112 au rang 86 (selon un rapport de 2014 du Forum Economic Mondial).

Pour ne citer que les plus illustres, la créatrice de la chaîne nigériane Mo Abudu a décidé de rentrer dans son pays natal, elle est aujourd’hui à la tête d’une des chaînes les plus en vue du continent. Le Ghanéen Patrick Awuah a quant à lui quitter les USA où il occupait un poste prestigieux chez Microsoft pour fonder l’université Ashesi dans son pays natal le Ghana.

Il appartient à chacun d’entre nous d’apporter sa pierre à l’édifice afin que les idées de Marcus Garvey restent une réalité immuable pour les générations futures.

Nombreux jeunes africains vivant hors et sur le continent africain se réclament panafricains. Certains le sont que sur les forums des réseaux sociaux, d’autres n’ont jamais été en Afrique. Pour tous ces jeunes africains, il est nécessaire de connaitre l’œuvre de Marcus Mosiah Garvey afin de comprendre l’origine du panafricanisme et le reste du parcours pour le parfaire.


Sisi Adouni,

Stagiaire

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