Des études onéreuses pour un salaire de misère de retour au pays

Des études onéreuses pour un salaire de misère de retour au pays

Des études onéreuses pour un salaire de misère de retour au pays, c’est la situation dans laquelle se retrouve beaucoup de jeunes nigérians. Le système scolaire public s’est considérablement dégradé. Les grèves récurrentes des professeurs due aux impayés de salaires et le désengagement de l’état sont les raisons de ce désastre. Une situation semblable aux 4 coins du continent qui explique la fuite des cerveaux. Les Nigérians quittent le pays coûte que coûte pour pouvoir bénéficier d’une meilleure formation. Ici, les études onéreuses commencent dès le secondaire.

“Son année en Angleterre représente un investissement de plus de 23K€ pour ses parents”

Les enfants originaires de la région de Lagos vont dans les internats anglophones de Cotonou et ceux originaires du sud est du pays se rendent au Cameroun. L’investissement des parents dans des études onéreuses s’intensifient lors de l’entrée à l’université. En effet, les parents qui le peuvent envoient leurs enfants à l’étranger, les moins fortunés vont au Ghana et les plus chanceux aux USA ou en Angleterre.

“Elle gagne 180€/mois, un salaire similaire à ce que gagne en début de carrière un chauffeur privé souvent très peu instruit”

Deux jeunes nigérians ont accepté de partager leur expérience avec nous.

Bisola Adéwalé, 26 ans
Elle a effectué ses 4 premières années d’université au Nigéria et s’est rendue en Angleterre pour son master d’un an. C’est à l’université de Coventry qu’elle a effectué son master de comptabilité, soit un investissement d’environ 11 464€ uniquement pour la scolarité. Il faut ajouter à ce montant les frais de loyers compris entre 435€ et 1150€ par semaine, et un autre budget dédié à la nourriture et autres dépenses. Les étudiants étrangers ont la possibilité de travailler 10h/semaine. Bisola travaillait en tant que serveuse dans un fast food à 8£/heure pour un salaire mensuel de 360€ afin de contribuer aux dépenses de ses parents. Son année en Angleterre représente un investissement de plus de 23K€ pour ses parents. Cela fait 2 ans qu’elle est rentrée, elle occupe le poste de comptable junior pour une start up, elle gagne 180€/mois. Un salaire similaire à ce que gagne en début de carrière un chauffeur privé souvent très peu instruit.

A lire aussi : Les étudiants africains en France

Chinedu Ngozi, 35 ans
Il a effectué son master de business à l’âge de 27 ans à l’université de Nottingham en Angleterre. Une scolarité à 10 000€ et des frais similaires à ceux de Bisola. Il n’a pas eu à travailler compte-tenu des revenues de ses parents. De retour au pays il occupe un poste de business developer à 25€/ mois. Une domestique qui se déplace 4 fois par semaine est payée 68€/mois. Il a ensuite occupé un poste de responsable des ressources humaines à 500€. Deux ans après il a l’opportunité de se rendre au Kenya en tant business developer pour un salaire de 1220€ mais l’entreprise se révèle peu sérieuse il rentre au Nigéria après 3 mois. De retour au pays il rejoint une start-up en tant que chef des ventes et responsable des ventes pour une rémunération de 560€ pendant un an. Depuis 6 mois il travaille en tant que consultant pour une compagnie anglaise et gagne 1950€/mois.

Les parcours de Bisola et de Chinedu sont ordinaires, des milliers de jeunes ayant étudié à l’étranger peine à gagner un salaire à la hauteur de l’investissement de leurs parents. Le chemin est long comme on peut l’observer au travers du parcours de Chinedu. Les parents devraient alors se poser la question du véritable intérêt de ces études onéreux. Car beaucoup ne parviendront jamais à atteindre une rémunération semblable à celle de Chinedu. Si les parents disposent de sommes aussi importantes pourquoi ne pas investir autrement dans l’avenir de leurs enfants ? A travers peut-être l’achat d’un bien immobilier. Une façon aussi d’injecter ces devises dans notre propre économie.

Actuellement, le pays regorge de jeunes dotés de formations de niveau international mais qui gagne le même salaire qu’un chauffeur ou qu’une domestique pour certains soit 113€.

Sisi Adouni, correspondante à Lagos

Souscrire à notre lettre d'information