Collecter et maitriser les données statistiques en Afrique, la clé pour un développement cohérent

La société, les faits sociaux et l’homme, ont toujours été un objet de mesure pour des besoins de cohérence et de transparence. L’accès à la connaissance n’est pas un simple fait de discussion interpersonnelle basée sur l’échange verbal, mais la nécessité d’un échange interactif est porteuse de sens et de bonne bienveillance. Alors le continent africain reste aujourd’hui numériquement muet, pour mieux dire encore il se laisse raconter par les autres à travers les chiffres. La sociométrie, l’économétrie, la politométrie sont de nos jours des appareils ou des outils de mesure qualitatifs et quantitatifs efficaces pour des projets de prise de décision et de veille stratégique d’ordre politique ou économique. La mise en place d’une telle science est moins présente dans les débats concernant le continent.  À l’ère où la belle Afrique reste floutée, indistincte, confuse, incompréhensible, ignorée, les États doivent prendre en compte l’intégration et le renforcement de la capacité statistique comme partie intégrante de leur stratégie de gouvernance « je dirais gouvernance équitable ».

 

Les États et les statistiques, quel avantage dans les prises de décisions ?

 

Au-delà de leur dimension numérique, les statistiques sont un instrument de communication et de la démocratisation de l’accès à la connaissance s’il y a effectivement lieu de la vulgarisation des résultats des différentes réalisations probantes.  Plus un phénomène est quantifié, interprété, mieux sa compréhension sera accommodante. Les lacunes de nos États (États africains) sont multiples et variées, mais la base demeure encore leur centralisation, les administrations sont subordonnées au gouvernement qui, à son tour dispose d’un pouvoir hiérarchique. En l’absence des agents et des intuitions de recherche, nos État mènent finalement des politiques sans une gouvernance d’envergure et sans mesure de trajectoire. La communication politique doit sa réputation qu’elle soit bonne ou mauvaise, à la transmission des informations fiables et véritables. À partir du moment où le politique n’a pas d’appui scientifique ou intellectuel pour justifier ses actions, il sera sans doute qualifié de « maître ignorant ». Les données statistiques sont aujourd’hui le principal pilier de l’aide à la décision. Cette pauvreté de chiffres est propre au continent africain. Malgré la mise en place des institutions sous régionales de la statistique comme l’AFRISTAT (Observatoire économique et statistique d’Afrique subsaharienne), le continent peine à renfoncer et à améliorer ses différents indicateurs en termes de diffusion de l’information : l’éducation, la santé, la gouvernance, les conflits, la recherche etc. L’AFRISTA créée par le traité du 21septembre 1993 à Abidjan par les 14 pays de la zone Franc (Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Comores, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée Equatoriale, Mali, Niger, Sénégal, Tchad et Togo) doit jouer ce rôle d’acteur statistique en présidant des études statistiques indépendantes. Comme cela a été le cas des autres institutions dites africaines, AFRISTAT n’a toujours pas connu son jour de souffle pour pouvoir briser le carcan de la discipline internationale contraignante. Cette coercition institutionnelle fait aujourd’hui que l’AFRISTAT ne fait pas l’objet des publications scientifiques au-delà de la tradition du FMI quand il s’agit de délibérer des données sur le continent africain.  Dans ce contexte, nous sommes actuellement confrontés à des problèmes politiques dans les prises de décisions et à une forte insuffisance des outils de mesure et des agents statistiques africains bien formés. Les failles sont grandes pour être résolues. Les pays africains doivent nécessairement se donner comme mission de contribuer au développement des statistiques économiques, sociales et environnementales pour rendre le continent aisément exploitable et étudiable. Il n’y a point question de développement, de gestion, et même de paix tant qu’il n’existe pas des éléments historiques de mesure. Nous ne pouvons aborder tous les avantages liés à une capacité statistique efficace.

 

Le Big data comme instrument de connaissance

 

Si nous nous intéressons à la nouvelle ère du Big Data, la plupart des nations travaille sur cette question en liant le développement social et économique à l’exploitation et l’interprétation des données. Les stratégies sont nombreuses et pertinentes dans les pays développés et d’ailleurs, plusieurs actions ont été réalisées grâce à cette nouvelle méthode de l’intelligence économique. Ce ne sont pas seulement les entreprises privées qui s’alignent à cette philosophie, mais les États sont aussi les acteurs principaux en mettant en place les politiques d’ouverture de données au public sous l’appellation « Open data ».  Chaque individu sur terre est producteur de données qu’il soit usager ou pas des terminaux digitaux. Nous travaillons, nous mangeons, nous vendons, nous achetons, nous nous soignons, nous voyageons et tous ces éléments sont devenus quantifiables de nos jours. Aujourd’hui les technologies de l’information et de la communication nous ont donnés la capacité de produire plus de données qu’il y a 10 ans. Le volume mondial de données numériques va exploser d’ici 2020, notamment à cause de l’internet des objets et de leurs milliards de capteurs, selon un rapport du géant américain du stockage de données EMC et du cabinet de recherche IDC.

Alors, si le continent africain ne veut pas passer à côté de cette mine d’or,  ses acteurs doivent comprendre que l’analyse et l’exploitation des données massives (Big Data) comportent deux principaux défis :

  • d’abord la collecte des données issues du digital qu’elles soient produites par les individus, les organisations et les entreprises ;
  • la numérisation et l’accessibilité des données qualitatives offline que nous produisons dans nos quotidiens.

 

La maîtrise de ces deux typologies de données doivent être aujourd’hui prise en compte dans la chaine de valeur de l’économie africaine. Nous avons brièvement abordé quelques avantages liés aux TIC dans l’un de nos précédents articles.

 

Nous sommes arrivés à un moment crucial où l’Afrique doit prendre son destin en main en adhérant aux nouvelles philosophies du développement socio-économique. Si nous avions des données statistiques fiables, beaucoup de questionnements ne feraient pas aujourd’hui l’objet d’ambiguïté. Nous devons enfin avoir un engouement assez fort pour le renforcement de notre capacité statistique pour développer nos différentes stratégies qui n’ont connu que des faillites depuis la nuit des temps.  Les statistiques comme logistique de l’information, sont aujourd’hui les moyens par lesquels les politiques africains pourraient prendre des décisions rapides, fiables, pertinentes, non basées sur leurs intuitions singulières mais sur les données.

 

La visualisions des données est aujourd’hui l’œil secondaire des décideurs !

 

NIARE Maramory

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